Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Mediacteur
9 avril 2013

Dans le cadre du Mooc ReSop : Question à François Jourde (4ème semaine)

A propos des Fakebooks comme processus pédagogiques

Capture d’écran 2013-04-09 à 12

La question a surgit dernièrement dans une conversation entre praticiens en Education aux Médias : « Régulièrement prescripteurs d’usages et d’outils sur le net en formation, comment nous situer face à ces détournements « à des fins pédagogiques » ? » L’exemple qui avait déclenché le débat était justement celui des fakebooks (Cf profil dédié au Père Goriot) qui divisait à l’évidence les formateurs. Contractuellement, le signataire des conditions d’usage de Facebook s’engage à ne créer qu’un seul profil personnel. Des « groupes » et des « pages » peuvent aussi trouver leur place dans l’arsenal facebookien… mais pas des profils de personnages de fiction. En invitant les élèves à ce type de productions (indéniablement très intéressantes sur le plan pédagogique) ne pousse-t-on pas à la faute ? Et sans aller si loin dans l’exercice de mystification, n’est-ce pas tout aussi déontologiquement suspect quand on invite ses élèves, pour des raisons de confidentialité, à se créer un second profil, pour un usage spécifiquement scolaire de l’outil social ?

Et à y bien remarquer, la question déborde du seul usage de Facebook. En effet, pour des raisons de prudence, les éducateurs sont parfois enclin à donner aux élèves des consignes contradictoires, disant à la fois tout l’intérêt qu’il y a à se construire une identité numérique forte (exempte de tout dérapage de publications tant impulsives qu’intempestives sur le long terme – une vraie compétence à acquérir) et prônant par ailleurs une réserve allant jusqu’à la mystification pour ne pas dévoiler inutilement ses coordonnées personnelles.

Derrière ces exemples, la question centrale touche à la déontologie du formateur ou de l’enseignant : peut-il inviter ses élèves à tricher avec les règles en place… sous prétexte de contexte pédagogique… une fréquente exception que l’école revendiquerait d’être au dessus des lois, sous prétexte d’éducation.

Face au point de vue carré de ceux qui insistaient sur le respect strict des prescrits légaux et des engagements signés par les utilisateurs, un autre groupe de formateurs justifiait de sa pratique en précisant les éléments suivants :

-       Les conditions d’utilisation d’un logiciel ou d’un service n’ont pas force de loi, mais précisent les termes d’usage communément admis, de sorte que les utilisateurs sachent « dans quel jeu ils jouent »

-       Le dépassement des usages originaux d’un outil ou d’un service fait partie de son l’évolution, de sorte qu’il mute de façon consensuelle et collective vers de nouveaux usages qui sont progressivement intégrés aux usages permis, voire publicisés par la firme qui les instrumente et les développe. Ainsi, Facebook qui était au départ un trombinoscope d’universitaires, a-t-il évolué vers ce qu’il est aujourd’hui pour le plus grand bénéfice (et aussi économique) de son propriétaire qui ne s’en plaint pas.

-       Le détournement à des fins pédagogiques est l’illustration quotidienne de la créativité des enseignants qui font feu de tout bois pour atteindre leurs intentions… sans que, bien sûr, les prescrits légaux ne soient transgressés.

 

Reste qu’un élément doit être pris en compte, qui est sans doute un peu original du fait que ceci se passe sur le net : antérieurement, quand un enseignant détournait un concept sociétal (un objet, un processus, une technique) il le faisait généralement dans la confidentialité des murs de la classe. Aujourd’hui, avec la publicité dont profitent les productions éditées en ligne, on n’est plus cloisonné dans l’intimité du champ pédagogique. En ce sens, wikipédia qui a développé en son sein, un espace spécifique pour le développement de projets pédagogiques a tenté de différentier les usages. Mais ce n’est pas pour cela que le monde scolaire s’en contente en s’interdisant toute intervention dans l’encyclopédie elle-même. Car si l’école est un lieu test où le droit à l’erreur réclame parfois que l’on s’essaye en terrain d’écolage sécurisé… il n’en demeure pas moins vrai que la finalité ultime des apprentissages est bien de se mouvoir dans la vraie circulation au quotidien (on percevra le parallélisme que cette image permet avec les autoroutes de l’information) et que cela doit à un moment se pratiquer dans la « vraie vie », sur le vrai réseau, avec sa vraie identité.

De quelle manière François Jourde se positionne-t-il dans ce débat ?

Publicité
Publicité
Commentaires
J
Merci pour ce retour.<br /> <br /> Je vais suivre cela sur Twitter.
C
Merci Fr. Jourde.<br /> <br /> <br /> <br /> Ce jour, je constate que le sujet revient une nouvelle fois sur le tapis, à l'occasion d'un colloque organisé à Nice (écriTech’4 : 11 & 12 avril 2013 au Pôle universitaire Saint Jean d’Angély – Université de Nice – Sophia Antipolis).<br /> <br /> <br /> <br /> Les LiveTweet qui circulent mentionnent les propos de Catherine Becchetti-Bizot, Inspecteur général de l’Éducation nationale et Gilles Braun, Conseiller du ministre de l’Éducation nationale pour le numérique. <br /> <br /> <br /> <br /> Je copie-colle ceux-ci :<br /> <br /> - RT @elviofisler: #ecritech4 Merriaux: le détournement c'est la pédagogie, je bois du petit lait !!!!<br /> <br /> - le détournement c'est la pédagogie #ecritech4 le bricolage c'est la pédagogie ? cc @moiraud<br /> <br /> - RT @cduret: #ecritech4 urgent de ns livrer à un détournement de ces outils à des fins pédagogiques<br /> <br /> - attention au terme "détournement", sujet sensible en ce moment MDR #ecritech4<br /> <br /> - #ecritech4 besoin aussi (en urgence) de simplifier la loi sur l'exception pédagogique absolument illisible aujourd'hui !!!<br /> <br /> <br /> <br /> Mediacteur
J
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> Si une activité va sciemment à l'encontre d'un règlement (comme en créant un profil fictif sur Facebook ou en y créant un second profil personnel), il y a alors en effet une illégalité contractuelle, — même si elle n'est pas malintentionnée. Je ne pense pas que le formateur puisse se prévaloir ici d'une quelconque exception lui donnant le droit de "tricher" (pour reprendre votre question). Mais c'est sans doute au juriste (que je ne suis pas) de nous dire dans quelle mesure cela est aujourd'hui défendable ou pas (clause d'exception pédagogique ?). Mais on peut espérer que la prise en compte de nos usages amènera à modifier certaines règles juridiques, comme vous le suggérez dans votre texte.<br /> <br /> <br /> <br /> Personnellement je n'ai jamais mis en place une activité pédagogique nécessitant la création d'un vrai-faux profil Facebook : mes productions "Fakebook" utilisent des moyens de pastiches détournés (voir par exemple : http://www.classtools.net/fb/home/page).<br /> <br /> <br /> <br /> Dans le cadre de créations de comptes en ligne pour des activités numériques, j'invite personnellement mes élèves à ne pas utiliser de pseudonymes de manière à ce que je puisse les identifier facilement (c'es d'abord ici, pour moi, un souci pratique). Mais je les invite aussi à renseigner le plus succinctement possible leurs profils (en évitant si possible la mention du sexe, de la résidence, ect.).<br /> <br /> Si j'aime pratiquer les détournements, c'est toutefois en essayent de garder un cadrage qui évite l'ambiguïté (il ne s'agit pas de mystifier : le jeu reste explicite).<br /> <br /> <br /> <br /> Je suis finalement très heureux de lire les dernières lignes de votre texte, sur l'exigence d'un "terrain d'écolage sécurisé", mais aussi celle d'une inscription des pratiques dans l'espace public. <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour ces questions stimulantes !<br /> <br /> <br /> <br /> F. Jourde
M
Tout ceci n'est pas sans lien non plus avec la question de l'exception pédagogique dont se revendiquent les professionnels de la pédagogie, en face aux professionnels de l'édition. <br /> <br /> Lire à ce sujet : http://www.actualitte.com/programmes/exception-pedagogique-et-numerique-prevenir-le-pillage-de-ressources-41351.htm
Publicité
Archives
Publicité